HOMÉLIE 25ième DIMANCHE
«Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon». Si vous prétendez glorifier Dieu le dimanche, à l'église, et le reste de la semaine vous l'oubliez pour ne penser qu'à accumuler les piastres, même au détriment des autres, alors c'est Mammon que vous glorifier.
Mais il y a plus que cela à considérer : Certaines traductions récentes de la Bible utilisent simplement le mot «argent» au lieu de Mammon et alors nous perdons une distinction importante, car l'argent n'est pas toujours Mammon. Comme toute autre invention, l'argent est ni bon ni mauvais en soi, mais il devient l'un ou l'autre selon les intentions de l'utilisateur. Il peut être utilisé en tant que serviteur du bien commun ou de la justice sociale et alors il est un argent bon, comme il se doit. Mais il y a aussi un mauvais argent lorsque celui-ci est utilisé égoïstement par des gens qui l'adorent pour la richesse et le luxe qu'il procure ou pour le pouvoir et le contrôle qu'il permet d'exercer sur les autres. C'est alors, que l'on peut l'appeler Mammon.
L'argent est l'instrument social le plus efficace qui soit. Les êtres humains ont besoin d'échanger les biens et services entre eux et il est beaucoup plus facile de le faire en utilisant l'argent. La civilisation n'aurait guère pu progresser sans lui. L'argent fonctionne d'une manière similaire à celle d'un sacrement. Dans le domaine spirituel, le domaine de la grâce, on nous a appris que le sacrement est un signe qui produit ce qu'il signifie. Dans le domaine temporel, le domaine physique, l'argent est aussi un signe qui produit ce qu'il signifie. Dans la vie spirituelle, un sacrement doit compter sur la foi chrétienne pour produire efficacement ce qu'il signifie. De même, dans le monde temporel, l'argent doit compter sur la croyance et la confiance envers lui pour qu'il puisse être efficace et accomplir ce qu'il signifie. Voilà pourquoi l'argent est aussi appelé crédit, du mot latin credere «croire». Si on ne lui fait pas confiance ou si on n'y croit pas, l'argent ne réduit à de simples chiffres sans valeur, comme pour la fausse monnaie.
L'argent est aussi un moyen pour la répartition des richesses. Dans son encyclique Laborem exercens, le pape Saint Jean Paul II parle de deux héritages sociaux: d'abord, les ressources naturelles que le Créateur à destinées à tous, et en second lieu, les inventions qui rendent le travail plus facile et plus productif pour le bénéfice de tous le membres de la société humaine. Malheureusement, dû à la manière dont l'argent est maintenant créé et administré, il est impossible de répartir équitablement les fruits de ces deux héritages communs. Pour que cette justice soit faite, le système monétaire actuel aura à subir une refonte complète.
L'argent est un signe destiné à un seul but: servir la nature sociale de l'homme en vue de son bien commun. Si l'argent devient monopolisé par des intérêts privés, il ne sert plus le bien commun, mais devient l'idole appelé Mammon, c'est à dire, un mauvais argent utilisé pour contrôler les gens et les gouvernements. Donc, Mammon tend à devenir l'outil de Satan, le prince de ce monde, dont l'ambition est d'établir une dictature mondiale occulte et néfaste. Ce pouvoir clandestin est déjà parmi nous dans une certaine mesure. Je n'invente pas çà ! Pour le voir, il suffit lire l'encyclique Quadragesimo anno de Pie XI, publié en 1931, où il écrivait que «cette dictature est surtout considérable chez ceux qui, détenteurs et maîtres absolus de l'argent, gouvernent le crédit et le dispensent selon leur bon plaisir. Par là, ils distribuent en quelque sorte le sang de l'organisme économique dont ils tiennent la vie entre leurs mains, si bien que sans leur consentement nul ne peut plus respirer.» Personne ne peut plus respirer contre leur gré ! Cela ressemble à ce passage de l'Apocalypse où il est dit que ... personne ne pût acheter ni vendre, sans avoir la marque, qui est, le nom de la bête ou le nombre de son nom.
Plus la mondialisation et la technologie augmente, plus ce signe que nous appelons argent ou monnaie devient nécessaire pour le bien-être de la société, mais d'autant plus catastrophique, il sera, s'il tombe sous le monopole complet de la bête mentionnée dans le Livre de l'Apocalypse. Partons du fait qu'il y eut plusieurs étapes de développement au cours de l'histoire de l'argent. Dans un passé récent, ses différentes valeurs ont été représentées par des nombres inscrits sur papier ou métal (tels que l'or, l'argent, le nickel et le cuivre), mais de nos jours le progrès a introduit l'argent et le crédit électronique - une virtuelle abstraction qui nécessite rien qu'un chiffre et un mot de passe pour être déplacée. La monnaie électronique, en tant que telle, n'est pas une mauvaise chose. Les cartes de crédit, par exemple, sont de plus en plus utiles aux établissements commerciaux et remplacent rapidement l'argent en espèces. Cependant, ils peuvent également être utilisés par des systèmes maléfiques. Supposons que les nations décidaient de se regrouper sous un gouvernement mondial : Cela, en soi, pourrait être soit bon ou mauvais, mais ce serait désastreux si c'était dominé par les puissances mammonisantes décrites par le pape Pie XI dans son encyclique. Donc, supposons qu'un tel gouvernement aurait assumé le pouvoir de régner sur l'Eglise et aurait promulgué des décrets qui contredisent la loi divine; supposons que tous les comptes et les cartes de crédit étaient regroupées sous un seul distributeur et contrôlé par ce gouvernement mondial; supposons qu'un tel gouvernement aurait le pouvoir d'invalider les cartes de crédit et les comptes de ceux qui lui désobéiraient; alors on aurait à choisir entre nier Dieu ou mourir de faim.
Ainsi, vous pouvez voir combien il est important de savoir ce qu'est l'argent. Allons-nous dériver sans résistance avec le courant conduit par Satan, le prince de ce monde ? Allons-nous le laisser prendre en charge la plus efficace invention sociale de l'homme pour en faire l'idole que nous appelons Mammon? N'y a-t-il pas le danger qu'un jour, comme le Livre de l'Apocalypse nous en informe, nous pourrions ne plus pouvoir acheter ou vendre sans sa marque ou son chiffre? Ne devrions-nous pas faire quelque chose pour empêcher la mammonization complète de l'argent? Jésus avait raison de dire que les fils de ce monde sont plus avisés dans le traitement de leur propre génération que les fils de la lumière, mais il a ajouté que celui qui est fidèle pour très peu est fidèle aussi pour beaucoup. Alors, pourquoi ne pas être fidèle pour très peu en nous rendant plus sage et mieux informés au sujet de l'argent? En agissant ainsi nous contribuerons au bien commun et à la construction d’une société qui met au centre la personne humaine (et non pas Mammon). (Intention universelle du Saint Père pour ce mois-ci.)
À l'heure actuelle, autant que je sache, il n'y a pas d'école, d'université ou de collège qui offre des cours spécifiquement sur l'argent – il se peut que l'argent soit enseigné dans le contexte de l'économie, mais non pas l'argent en soi. Puisque l'argent est le moteur qui meut l'économie, pourquoi ne pas apprendre ce qu'il est en lui-même? Pourquoi ne pas entreprendre une action constructive dans cette direction? Pourquoi ne pas créer une école qui enseigne la science de l'argent ? En effet, le concept d'un tel projet existe déjà: Ce serait une école simplement appelé faculté parce qu'elle offrirait un programme spécialisé et limité; une faculté indépendante, parce qu'elle ne ferait pas partie intégrante d'une institution déjà existante, quoique elle pourrait s'affilier avec un collège ou université. On y enseignerait l'histoire de l'argent - nous ne pouvons pas vraiment connaître une chose sans connaître son histoire. On y enseignerait la philosophie de l'argent: les principes sur lesquels un juste système monétaire doit se fonder. On y enseignerait les politiques qui accorderaient le système monétaire à l'enseignement social de l'Église. Tout ce qu'il faut pour un tel projet, la ville de Barry's Bay peut le fournir: le local, le logement et même un collège chrétien où les étudiants de la Faculté pourraient suivre des cours supplémentaires. En outre, un jeune professeur d'université, bien qualifié pour enseigner la science monétaire, aspire à le faire en temps et lieu selon le plan de la Providence. Catholique et fidèle, vivant non loin d'ici, cet homme a fait des recherches et écrit des livres sur le sujet de l'argent et il termine présentement un ouvrage sur l'argent et la répartition des richesses. Nous ici avons tout ce qu'il faut !(Je sais ce que vous pensez): «Tout ce qu'il faut, excepté l'argent.» Eh bien, oui, l'argent est un problème pour nous, mais non pas pour le Seigneur - Il peut même le pêcher hors du lac voisin. Si vous avez des doutes à ce sujet, il suffit consulter votre Bible: Mat. 17, 27. Faisons ce que nous pouvons et Dieu fera le reste.
Finalement, pour justifier mon homélie, permettez-moi de citer un passage approprié tiré du document l'Église dans le monde de ce temps, de Vatican II, qui se lit comme suit: «Quoiqu'il faut soigneusement distinguer le progrès terrestre de la croissance du règne du Christ, ce progrès a cependant beaucoup d’importance pour le Royaume de Dieu, dans la mesure où il peut contribuer à une organisation mieux ordonnée de la société humaine.» (39) Sans un système monétaire bien ordonné il y a peu de chance que notre progrès terrestre puisse contribuer à produire une société mieux ordonnée et de grande importance pour le Royaume de Dieu. Donc, lorsque dans sa bonté Dieu aura enlevé au prince de ce monde le contrôle de l'argent, il le remettra alors entre les mains de ses enfants qui auront appris à bien ordonner le système monétaire et à le diriger pour le bien de l'humanité et la croissance du règne du Christ.